Pour l’équipe qui se consacre à la restauration de la Pacific 3.1280, pas question de se retrouver désoeuvré chez soi pendant le confinement. Et c’est à domicile que le chantier s’est poursuivi…
A Oignies (Pas-de-Calais), le Centre de la mine et du chemin de fer (CMCF) réunit des passionnés de chemin de fer (des cheminots, mais pas que) qui restaurent soigneusement une fameuse locomotive à vapeur, la Pacific 3.1280 de la Compagnie des chemins de fer du Nord (lire LVDR n° 3712) ainsi qu’une authentique voiture transatlantique de style Pullman, construite dans les années 1930 (lire LVDR n° 3712 et 3783) et qui apparaît dans le film L’Héritier, de Philippe Labro (1973) avec Jean-Paul Belmondo. Mi-mars, comme pour la France entière, le confinement dû à la pandémie de coronavirus a stoppé net toute activité. « Il a fallu s’adapter… et nous y sommes parvenus », commente Laurent Gosselin, responsable de la section Atelier de restauration du matériel roulant. « Les travaux en atelier ont été stoppés, mais plusieurs membres de l’équipe ont continué à oeuvrer pour la Pacific 3.1280, chacun chez eux en mode “télétravail”. » Ce qui a permis par exemple, de confectionner une reproduction du macaron en bronze qui, à l’époque de la Compagnie du Nord, ornait la porte de la boîte à fumée de la locomotive. Fabrication d’un macaron en bois d’après un modèle SNCF et les plans du modèle Nord, prêtés par l’Association de jeunes pour l’entretien et la conservation des trains d’autrefois (Ajecta), découpe, application d’enduit… les étapes successives ont donné naissance à un macaron monochrome. Il ne restait plus qu’à faire la mise en peinture avant d’aboutir enfin au résultat final, très réussi. Autre chantier réalisé en “télérestauration”, la confection de la lanterne indicatrice du numéro de train. « La Compagnie du Nord fixait à l’avant de la locomotive une lanterne (que l’on appelle également cinéma). La lanterne indiquait de jour comme de nuit le numéro du train. Cela facilitait la tâche des agents des gares et des bifurcations, et des gares pour annoncer avec exactitude l’ordre de succession des trains et, éventuellement, leur retard » , explique Laurent Gosselin. C’est Jean-Marc qui s’est lancé dans la fabrication d’une réplique de cette lanterne. Il a commencé par découper et plier des tôles pour fabriquer le corps de la lanterne, a peint celui-ci ainsi que huit petits cadres, puis a fabriqué et peint les têtes destinées à faire tourner les numéros. Restait à faire l’assemblage du cinéma et à le fixer à l’avant de la locomotive. A partir du déconfinement, les bénévoles se sont retroussé les manches pour réaménager l’atelier. « Le Technicentre industriel SNCF d’Hellemmes, qui était en pleine réorganisation, nous a fait don de plusieurs cabines et bureaux d’ateliers ainsi que d’outillage, ce dont nous le remercions chaleureusement. Dès que la SNCF a pu nous accueillir, en toute sécurité bien sûr, nous nous sommes rendus sur place pour faire le démontage complet des cabines. C’était la solution la plus simple et la moins coûteuse en termes de transport. » Et les voilà partis à six dans la camionnette du CFMF équipée de la remorque de l’un d’entre eux. Il a ensuite fallu plusieurs voyages pour tout rapporter à Oignies et procéder au réaménagement. « Une partie de la grande cabine, trop grande pour l’atelier, est devenue le nouveau bureau-réfectoire, plus grand et plus lumineux que notre bureau actuel », détaille Laurent Gosselin.
« L’autre partie a été recyclée pour cloisonner la zone des machines- outils afin de les protéger de la poussière et du froid. » Pose des cloisons, des vitres, installation de l’éclairage… Après environ 500 heures de démontage et remontage, les cabines d’Hellemmes connaissent une seconde vie à Oignies.
Une seconde vie, c’est ce que le CFMF veut offrir à la Pacific 3.1280. Pour cela, il faut de l’argent… « Début 2020, nous avons continué de monter le dossier pour la recherche de financement pour la restauration de la machine, mais c’est un travail administratif qui prend beaucoup de temps. Alors, en attendant de trouver les fonds nécessaires à la remise en marche de la locomotive, nous avons choisi de la remonter provisoirement afin de la présenter aux visiteurs, élus et mécènes, dans son état restauré. En effet, il est plus facile de promouvoir un projet lorsque les investisseurs peuvent en avoir une vision globale, plutôt qu’un immense Meccano démonté aux quatre coins de l’atelier », explique Laurent Gosselin. « Nous avons donc replacé la chaudière sur le châssis et la cabine de conduite à l’aide d’une grue de levage, puis rentré la machine dans l’atelier. » Ces opérations, délicates s’il en est, se sont passées sans encombre. « Après cela, une fois mise à l’abri, la “Bête” était en place, prête à être restaurée. » Nettoyage des tôles, suppression des éléments absents de la version d’origine Nord, mise en peinture de la porte de la boîte à fumée, puis ponçage, ponçage et encore ponçage et application d’un apprêt, préparation des autres tôles de l’avant de chaudière et des pare-fumées… Résultat, ce trésor ferroviaire a de quoi séduire les donateurs et mécènes qui la contempleront sur place…ou en photo.
Contact : CFMF,
Don pour la restauration de la voiture transatlantique du film L’Héritier : sur ce lien
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