Remettre en service – de manière fictive – un poste d’aiguillage des années 1930 de la gare de Lyon-Perrache, c’est l’objectif atteint par Rails & Histoire, avec le soutien de SNCF Réseau. Le public a pu prendre les commandes lors des Journées du patrimoine en septembre 2021. Cette animation sera de nouveau proposée en septembre prochain.
Désaffecté depuis 2016, le poste d’aiguillage 1 de la gare de Lyon-Perrache situé quai Rambaud aurait pu prendre une retraite bien méritée après quatre-vingt-six ans de bons et loyaux services. C’était sans compter sur la volonté de l’association Rails & Histoire de redonner vie à cet élément du patrimoine ferroviaire, en y accueillant le public, avec le soutien de SNCF Réseau qui considère ce poste comme « remarquable » (lire LVDR n° 3810). Depuis 1930, ce poste électromécanique à poignées d’itinéraires Thomson-Houston (aujourd’hui Alstom), issu d’une série de 29 exemplaires, dresse sa haute silhouette adossée au pont ferroviaire de la Quarantaine qui franchit la Saône. Le poste avait pour fonction de contrôler les itinéraires des trains entre la gare de Lyon-Perrache (côté Ouest) et le tunnel ferroviaire de Saint-Irénée. « Atypique, la silhouette du bâtiment attire naturellement le regard et elle est familière à de nombreux habitants de Lyon et de sa métropole. Ils perçoivent l’édifice quotidiennement, mais de manière fugace, et ils n’en connaissent pas la fonction. Le poste garde une part de mystère… », explique Olivier Vellay, architecte du patrimoine, membre de Rails & Histoire, chargé du projet de reconversion baptisé Perrache Poste 1. Objectif : reconstituer les conditions réelles d’exploitation du poste dans les années 1950 et en confier les commandes, de manière fictive, au public le temps d’une visite d’une heure environ.
Aiguiller le Train Bleu et le Mistral…
Après un gros travail d’écriture du logiciel de simulation puis de câblage, restait à remettre en service le pupitre de commande, le tableau de contrôle optique et sa multitude d’ampoules, et tous les éléments associés. « Nous reproduisons à l’identique les circulations du vendredi 10 juillet 1954, de 0h à minuit. Pour cela, nous avons compilé, à partir du Chaix de l’été 1954, les horaires de tous les trains entrant et sortant de Perrache, 330 au total !
Après la Première Guerre Mondiale, la saturation de la gare de Lyon-Perrache, alors dans sa configuration de 1890, liée à l’accroissement continu du trafic ferroviaire sur la ligne de Paris à Lyon poussa la compagnie P.L.M. à réagir.
Une refonte profonde du plan des voies fut décidée, et initiée au milieu des années 1920: création de nouvelles voies du côté de l’actuelle rue Dugas-Montbel, allongement des quais, doublement du viaduc existant sur la Saône, passant de deux à quatre voies, et doublement du viaduc sur le Rhône, passant de deux à cinq voies.
Ces différents travaux imposent le renouvellement des postes d’aiguillage mécaniques existants, incapables de faire face à l’accroissement projeté du trafic.
Le nouveau poste 2 est mis en service en 1925, le nouveau poste 1 en 1930. Tous deux sont des postes électromécaniques à poignées d’itinéraires, fabriqués par Thomson-Houston, et figurent parmi les technologies les plus abouties de l’époque.
Un poste 3 attaché à Lyon-Perrache, bien que situé de l’autre rive du Rhône, complète l’ensemble.
Suivant la Deuxième Guerre Mondiale, de grands chantiers d’électrification des lignes ferroviaires sont lancés par l’Etat, de manière à diminuer particulièrement la consommation de charbon par la SNCF, l’objectif étant d’affecter ces ressources libérées à d’autres industries très consommatrices.
L’électrification de la ligne de Paris à Lyon, décidée en 1944, atteint Lyon en 1952. Le poste 1 est alors modernisé et adapté: mise en place de nouveaux enclenchements de sécurité, adaptation à la signalisation automatique lumineuse (B.A.L, pour Block Automatique Lumineux).
Les postes 2 et 3, affectés à la gestion de la partie Est de la gare, sont à cette occasion fusionnés et entièrement reconstruits, le poste 1 demeurant le seul poste électromécanique à Lyon-Perrache.
Par la suite, les installations du poste d’aiguillage évoluèrent peu, bien que la radio, l’informatique, l’électronique, affectèrent d’autres domaines (suivi des trains, communications entre les postes d’aiguillage et avec les conducteurs, travail administratif, etc.). La cabine fût bien sûr rénovée et modernisée de manière régulière (sols, plafonds, fenêtres, etc.) jusqu’à totaliser trois épaisseurs de linoleums sur le plancher et six couches de peinture sur le pupitre de commande.
En novembre 2016, le poste 1 et le poste 2 sont désaffectés, les installations de la gare de Lyon-Perrache étant désormais commandées par un poste d’aiguillage à technologie informatique, situé près de la gare TER de Jean Macé.
L’étude pour la reconversion du poste est entamée en 2017. Le projet est lancé début 2019 et entre dans une phase opérationnelle en 2020. Les travaux étaient en cours depuis lors, avec pour objectif une ouverture au public vers la fin de l’an 2021, a pu voir la lumière du jour le septembre dernier par bonne chance.