Au Canada, c’est un scandale national, qui éclabousse jusqu’au sommet du gouvernement fédéral et met en péril SNC Lavalin, une des entreprises d’ingénierie les plus réputées du pays. Les origines de cette « affaire SNC Lavalin » sont à chercher en Libye, à l’époque Kadhafi : l’entreprise québécoise est accusée d’avoir « donné, offert ou convenu de donner ou d’offrir » à une société libyenne « un prêt, une récompense ou un avantage de quelque nature que ce soit d’une valeur de 47,7 millions de dollars [canadiens] ou plus ».
L’actuel Premier ministre Justin Trudeau, qui n’était pas au pouvoir à l’époque (2001-2011), souhaiterait éviter un procès criminel à SNC Lavalin, qui risquerait une exclusion des contrats publics fédéraux pendant 10 ans. Un tel jugement aurait des répercussions considérables, pour les 50 000 salariés que compte dans le monde SNC Lavalin, dont la réputation serait ternie. De plus, soulignent les observateurs de la politique canadienne, l’entreprise d’ingénierie se trouve être un des financeurs du Parti libéral au pouvoir à l’échelon fédéral.
Il semble que des pressions aient été exercées, au sein du gouvernement, sur Jody Wilson- Raybould, ministre de la Justice et procureure générale jusque début 2019, afin qu’elle tente de convaincre le Service des poursuites pénales du Canada de conclure un accord de réparation avec SNC Lavalin, ce qui éviterait un procès criminel. Toujours est-il que début 2019, Jody Wilson- Raybould a reçu le portefeuille des Anciens combattants, avant de démissionner.
Si les conséquences politiques de l’affaire sont considérables (alors que les élections approchent), que deviendront les projets pilotés par SNC Lavalin, en particulier dans le domaine Rail & Transit ? Déjà, des soupçons de favoritisme refont surface, par exemple pour l’attribution du projet REM à Montréal (voir illustration) qui vise à établir un réseau de métro léger via le tunnel ferroviaire du Mont-Royal. Un projet qui a ses critiques, vu qu’il obligera les usagers de certaines lignes de train de banlieue à effectuer un changement pour gagner le coeur de Montréal. SNC Lavalin est également aux commandes de la ligne de métro Canada Line de Vancouver jusqu’en 2040 et membre du PPP pour le tramway Confederation Line d’Ottawa. Outre ces grands projets canadiens, SNC Lavalin a pris une dimension mondiale ces dernières décennies : en France, l’entreprise s’est fait connaître par le Panoramique des Dômes et en Grande-Bretagne, elle participe à plusieurs grands projets comme la ligne à grande vitesse HS2 ou les nouveaux trains de nuit écossais.
La récente croissance de SNC Lavalin à l’international ayant été rendue possible par l’acquisition de bureaux d’études, en particulier britanniques, des voix proposent déjà de rebaptiser la maison mère du nom d’un de ces bureaux, dont la réputation ne serait pas entachée…