En France, en ce mois de novembre 2018, la commémoration de l’Armistice de 1918, qui a mis fin à la Première Guerre mondiale, est le tout premier événement mémoriel en importance. Le 11 novembre, à Paris, près de 80 chefs d’État et de gouvernement sont attendus pour clore quatre années intenses en cérémonies, expositions et projets sur le thème de la Grande Guerre. Le même jour, toutes les communes de France sont invitées à faire sonner les cloches des églises à pleine volée à 11 heures pendant onze minutes pour célébrer ce moment solennel. Deux jours plus tôt, à Paris, une cérémonie doit avoir lieu en gare de l’Est en présence de Guillaume Pepy, Franck Renault, directeur de région de Paris-Est, plusieurs personnalités, des représentants d’organisations syndicales et d’associations de cheminots anciens combattants, ainsi que des cheminots de différents services.
Cérémonie mémorielle en gare de Paris-Est
C’est une immense plaque de marbre de Carrare qui égrène 1 200 noms et la première lettre du prénom : ceux des cheminots de l’ex-Réseau de l’Est morts pendant la Première Guerre mondiale. Élément du monument aux morts de la gare de l’Est à Paris, dans le Xe arrondissement, la plaque, ainsi que la demi-lune gravée, faite du même matériau et portant l’inscription « Aux agents du Réseau de l’Est morts pour la patrie – 1914-1918 », furent déposées il y a plusieurs années en raison de travaux réalisés dans la gare… puis oubliées pendant plus de quinze ans dans les sous-sols du bâtiment. Grâce à la ténacité d’Henri Dropsy, président du Cercle généalogique des cheminots, la plaque mémorielle et la demi-lune ont enfin été restaurées par un marbrier, Victor Pedrazzini, puis remises en peinture par un peintre en lettres, Roger Begue, afin d’être reposées dans la grande gare parisienne, celle d’où partirent tant de soldats français, britanniques et américains, appelés sur le front à partir de 1914. La réinstallation doit donner lieu à une cérémonie officielle le 9 novembre, présidée par Guillaume Pepy.
Les trains de la guerre aux Invalides
(c) Tacot des lacs
Jusqu’au 11 novembre à Paris, l’association qui exploite le Tacot des lacs, train touristique qui circule en Seine-et-Marne, exposera exceptionnellement au pied du Dôme des Invalides, un spécimen rare, vestige de la Grande Guerre : une locomotive de 1916 de l’armée d’Orient, de type Péchot (1888), prêtée par le musée de la ville de Požega en Serbie. On doit l’acheminement jusqu’à Paris de cette rareté à la ténacité de Patrick Mourot, fondateur du Tacot des lacs. Celui-ci n’est pas à un exploit ferroviaire près : à Grez-sur-Loing, son association a reconstitué quatre authentiques convois complets, de type Decauville (voie de 0,60 m), utilisés pendant la Première Guerre mondiale respectivement par les armées française, américaine, anglaise et allemande, et tous classés monuments historiques. Des trains volontairement conçus de petites dimensions pour être facilement manoeuvrables et capables d’affronter les terrains les plus escarpés. C’est le cas, par exemple, du train des Français de 1916 (photo ci-dessus). Ces convois militaires roulaient sur des voies ferrées portatives, rapidement construites (record de pose : 10 km en une seule nuit !) et reliées aux grandes lignes du réseau ferré français pour le transport, jusqu’au front, des soldats, de l’artillerie, du ravitaillement, mais aussi, à l’aide de wagons-citernes, de l’eau potable, denrée précieuse destinée aux locomotives à vapeur et aux soldats. Un aspect méconnu de la Grande Guerre, contrairement à l’aviation et aux célèbres taxis de la Marne…
Tacot des lacs, 01 64 28 67 67. tacotdeslacs@wanadoo.fr
À Rethondes, le wagon de l’Armistice
(c) X. Renoux/OT de l’Oise
Dans la forêt de Compiègne (Oise), la clairière de Rethondes fut il y a cent ans le théâtre d’un événement historique. En effet, c’est là que, le 11 novembre 1918 à 5 h 15, la convention d’armistice fut signée entre les Alliés, représentés par la France et la Grande-Bretagne, et les plénipotentiaires allemands, à bord du wagon 2419D stationné, qui avait été spécialement aménagé pour l’occasion. L’armée française avait réquisitionné le wagon auprès de la Compagnie internationale des Wagons-lits (CIWL). Ce dernier a été emporté à Berlin en juin 1940 sur ordre d’Hitler, puis détruit – mais le mémorial, qui est situé dans la clairière de Rethondes, expose un wagon de la même série (photos ci-dessus), le 2439D. Long de 20 mètres, il est aménagé à l’identique et décoré avec le mobilier d’origine.
À quelques mètres se trouve la maquette au 1/87e des deux trains de l’Armistice de 1918 : celui des Alliés et celui des Allemands, venu de Tergnier (photo en illustration de l’article). Oeuvre de Robert Gesuelli, modéliste confirmé, au terme de deux ans de travail, la maquette (2,50 m de long) représente les deux convois complets stationnés dans la clairière : voitures de la CIWL, wagon-restaurant 2419D réaménagé pour l’occasion en une grande salle de réunion, voitures- couchettes, wagons- lits, wagon dédié au central téléphonique, fourgons (pour le générateur électrique, le télégraphe et l’équipe des cheminots chargés du relais des locomotives à vapeur).
On est frappé par le soin apporté aux détails : luminaires, sièges, grande table de travail rectangulaire, arbres dépourvus de feuillage (la scène se déroule en novembre). Une centaine de personnages figurent les acteurs de cette matinée historique : tous les officiers présents, ainsi que le photographe auteur de l’unique cliché réalisé après la signature. Mais aussi le personnel de bord – mécanicien, chauffeur, employés de la CIWL –, les fantassins territoriaux qui assuraient la surveillance du site, sans oublier les automobiles utilisées par les Allemands pour rejoindre la clairière depuis la gare de Tergnier.
Le 9 novembre prochain, le président de la République, Emmanuel Macron, et la chancelière allemande, Angela Merkel, feront (sauf changement de dernière minute) une courte mais officielle visite sur place.
Mémorial de l’Armistice, route de Soissons, 60200 Compiègne.
Tél. : 03 44 85 14 18.