Carlotta Films a sorti le 15 mars dernier un coffret DVD et Blu-Ray du film Super Express 109 de Junya Sato : un classique du cinéma d’action japonais qui mêle film catastrophe, policier et drame social. Le tout à 250 km/h !
Dans une gare de triage d’Hokkaido, la nuit, un homme dépose une bombe piégeant la locomotive à vapeur d’un train de fret… Le lendemain, en gare de Tokyo, le Shinkansen Hitari n°109 à destination d’Hakata s’ébranle bientôt. Parmi les voyageurs, un groupe de rock et une équipe de journalistes qui les filme, des pèlerins et leurs tambourins, des hommes d’affaires et des familles. Bientôt, un coup de fil anonyme prévient le directeur de la sécurité ferroviaire : une bombe a été placée à bord du train et si celui-ci descend en dessous de 80 km/h la charge explosive sera enclenchée. À son bord, 1 500 passagers sont otages de ce chantage, les malfaiteurs réclamant 5 millions de dollars pour les épargner – le prix d’un Shinkansen. Quand la locomotive du train de fret explose, la police et la compagnie ferroviaire comprennent que les criminels ne bluffent pas.
Derrière ce chantage, Tetsuo Okita (Ken Takakura) et ses deux complices : Masaru Koga (Kei Yamamoto) et Hiroshi Oshiro (Akira Oda, connu en France pour avoir joué dans San Ku Kai). Le casting du film réunit de grandes stars de l’époque. Campé par Sonny Chiba, une autre figure du cinéma japonais de l’époque, le conducteur du train Aoki excelle ainsi dans son rôle tout en tension.
Carlotta Films, une société de distribution qui s’est donnée comme mission de défendre les films qui appartiennent au patrimoine du cinéma, a sorti en mars dernier en DVD et Blu- Ray, Super Express 109. L’occasion de voir l’intégralité de ce film dont la version française avait été raccourcie de plus d’1 heure, la version initiale dure plus de 2 heures 30.
Produit par les studios Toei pour concurrencer son grand rival de la Toho sur le terrain des films catastrophes, Super Express 109 reste encore aujourd’hui une référence du genre. Ironie de l’histoire, la fiabilité du système de la grande vitesse nipponne piège un peu plus le convoi piégé.
A sa sortie, le film rapporte quelque 530 millions de yens au box-office local et se voit attribuer le Readers’ Choice Award du meilleur film à l’occasion des Kinema Juno Awards de 1976. Le film s’exporte bien notamment en France, mais aussi aux Etats- Unis et un peu partout dans le monde.
Le thème de la grande vitesse ferroviaire semble marquer les esprits des producteurs nippons. Au Japon, Le Shinkansen est au centre d’un autre film catastrophe sorti un peu plus tard la même année L’archipel des artères de Yasuzo Masumura, où un homme menace le train si celui-ci continue à faire autant de bruit ! Le scénario de Super Express 109 se retrouve dans nombre de films par la suite.
Tout d’abord, dans un film thaïlandais de 1977 : 1,2,3 Monster Express. Puis, en 1985, sort Runaway train d’Andrei Konchalovski où deux repris de justice réussissent à s’évader de leur pénitencier en Alaska et à monter à bord d’un train de fret pour s’échapper, mais alors que le convoi démarre, le conducteur fait une crise cardiaque. Pire, les freins finissent par lâcher… Ce scénario est l’œuvre d’un autre cinéaste japonais, Akira Kurosawa. Celui-ci l’avait écrit dans les années 1960, mais n’était parvenu à le faire produire.
Nous retrouverons cette idée plus tard dans Speed, un blockbuster signé -Jan De Bont avec Keanu Reeve et Sandra Bullock, où la situation est identique. La différence principale étant que la charge explosive est placée cette fois-ci dans un bus longue distance. Plus proche de nous, la comédie française A fond met en scène une famille bloquée dans sa voiture lancée à folle allure à cause d’un régulateur de vitesse défectueux.
Mais Super Express 109 n’est pas juste un film catastrophe réussi au ressort dramatique terriblement efficace, c’est également un film policier avec enquête, surveillance, filature et course-poursuite. C’est aussi un drame social. Durement éprouvé par le choc pétrolier de 1973, le miracle économique japonais produit à l’époque des déclassés qui vivent à la marge du système. Les trois criminels sont trois archétypes de ces perdants de l’époque. Le cerveau de l’opération a perdu son entreprise et tous ses biens quand les banques ont refusé de lui prêter de l’argent pour faire face à la crise. Le premier de ses complices, Masaru Koga, est un ancien militant étudiant qui a vécu la violence des manifestations et le second est un jeune de la campagne venu vendre sa force de travail dans la capitale pour des salaires dérisoires. Ce projet criminel est en réalité une vengeance contre l’Etat, contre le système qui les écrase. Comme le dit Masaru Koga : « Quand on aura réussi, on ne sera plus de la vermine ».
Les suppléments proposés dans cette édition méritent d’être visionnés. Dans Un express poupée russe, Fabien Mauro, essayiste et auteur de Kaiju, envahisseurs & apocalypse re- vient sur la genèse du film ainsi que sur son apport au patrimoine cinématographique mondial. Puis, le réalisateur Junya Sato revient sur la fabrication de Super Express 109 et évoque pêle-mêle l’écriture du scénario, la mise en place du casting et le choix du titre. « Gros film, grosse panique » selon Junya Sato à propos de Super Express 109. On y apprend notamment comment la scène où le train piégé croise un autre Shinkansen à grande vitesse a été tournée. Les équipes des effets spéciaux de la Toei ont créé des maquettes de trains au 1/10e et se sont occupées du tournage en louant une caméra spéciale particulièrement onéreuse. Le cinéaste explique également comment les relations entre la production et la compagnie ferroviaire ont été difficiles. Il n’a ainsi pas pu tourner dans le vrai centre de contrôle et a dû en inventer un en studio.
Dans la version Blu-Ray, le spectateur peut également voir la version tronquée pour le marché français. Celle-ci omet un certain nombre de scènes essentielles et parfois souffre de quelques incohérences. Ainsi, les scènes avec la femme enceinte ont été supprimées.
Le coffret de cette édition prestige comprend également une reproduction de l’affiche du film, un fac-similé de l’Eiga Chirashi, le programme du film qui était déposé sur les sièges des cinémas avant la projection, ainsi qu’un jeu de neuf cartes reprenant des images du film. Un bel objet pour les collectionneurs et les cinéphiles !
En DVD et Blu-ray.
Super Express 109 de Junya Sato. Toei.
Carlotta Films. Japon. (1975)
Edition prestige limitée.
Prix : 28 euros.
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Cet article est tiré du numéro 3878 de La Vie du Rail.
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Le fameux film japonais, Shinkansen Daibakuha (titre original), Super Express 109 (titre français), The Bullet Train (titre anglais); est un thriller d’action japonais tant réussi en utilisant majeusteusement un train à grande vitesse (Le Shinkansen) comme une sorte d’acteur principal.
Le film a été présenté en première au Japon le 5 juillet 1975. Il est sorti en Amérique du Nord le 1er janvier 1976 et en France le 30 juin 1976.
Comme un bon film d’action doit avoir à la fois le drame convaincant et le rythme passionnant en les mélangeant dans un équilibre égal, on peut dire que Super Express 109 a accompli sa mission ardue avec un succès exemplaire.