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© Patrick Laval

Tiré par une locomotive interopérable Siemens Vectron, un train de nuit du « nouvel entrant » Snälltåget s’apprête à partir pour Malmö.

Suède. La « honte de l’avion » redonne sa chance aux trains de nuit

19 avril 2019
- -
Par : P. L.

Moins énergivore que l’avion, le train est devenu le moyen de transport « tendance » en Suède. Au point que le lancement d’un train de nuit vers l’Europe continentale figure au programme du gouvernement suédois.

Depuis quelque temps, prendre le train – de jour comme de nuit – plutôt que l’avion est devenu tendance en Suède, au point que certains ont médiatisé ce phénomène sous l’appellation flygskam, littéralement « honte de voler ». Dans le sillage de cette tendance, le gouvernement suédois a publié un communiqué selon lequel il allait « agir pour simplifier le voyage en train vers l’étranger ».

Car il faut actuellement bien du mérite pour prendre le train entre la Suède et le continent européen, à l’image de la jeune activiste Greta Thunberg. Il est en revanche plus simple de relier en train de nuit la Norvège voisine, qui n’est pas membre de l’Union européenne mais partage nombre de normes techniques avec le réseau ferré suédois. Paradoxalement, l’ouverture du lien fixe, le pont de l’Öresund, qui connecte depuis 2000 le réseau suédois au réseau européen, a entraîné la fin des trains de nuit vers le Danemark (seuls franchissent l’ouvrage des trains régionaux, voire grandes lignes, et le fret). Et depuis, les opérateurs « historiques » SJ et DB se sont retirés de l’exploitation de trains reliant la Suède et l’Allemagne en ferry. Ce train traversant la Baltique en bateau a toutefois survécu, mais à titre saisonner, exploité depuis 2012 par le « nouvel entrant » Snälltåget, filiale de Transdev : la saison 2018 a battu les records de fréquentation avec 12 000 voyageurs vers ou de Berlin… contre 200 000 voyageurs quand même sur les lignes aériennes entre la Suède et Berlin. En service intérieur, la Suède connaît un réel retour en grâce du train de nuit ces dernières années. Les trains de nuit de service public dont Trafiverket, l’administration des transports, est autorité organisatrice et l’opérateur ferroviaire historique SJ, est l’exploitant après appel d’offres, sont de plus en plus souvent complets. Ceux qui n’ont pas trouvé de place dans les trains de service public peuvent se rabattre sur les trains « privés » Snälltåget, dont les tarifs sont généralement attractifs. Ces trains « privés » sont apparus avec l’ouverture du marché aux opérateurs en open access, intervenue en Suède en 2010 pour les services intérieurs. Pour les services internationaux entre la Suède et le continent, en open access, l’offre se limite aux trains saisonniers Snälltåget vers Berlin. Afin d’augmenter l’offre, le gouvernement suédois a donné comme mission à Trafikverket d’organiser un appel d’offres « pour des trains de nuit avec des départs quotidiens vers plusieurs villes européennes », avec un budget de 50 millions de couronnes (environ 5 millions d’euros) à la clé. Déjà, l’opérateur historique SJ a fait part de son désintérêt à court terme – c’est-à-dire avant l’ouverture du lien fixe de Fehmarn (Danemark Allemagne), qui devrait considérablement réduire les temps de parcours vers le continent européen… en 2026 ! D’ici-là les éventuels trains de nuit seraient obligés de faire un grand détour par le lien fixe du Grand Belt (ouvert en 1997). De son côté, Snälltåget, exploitant du train de nuit vers Berlin, sait bien quelles sont les difficultés techniques. Ses trains au gabarit suédois, plus généreux que le gabarit continental, ne circulent que par dérogation en Allemagne (sur le réseau de l’exRDA, apte à recevoir des trains de grand gabarit). Pour circuler au Danemark et en Allemagne (anciennement de l’Ouest), il faudrait acquérir des trains au gabarit continental. Côté locomotives, en revanche, les questions d’interopérabilité (alimentation électrique, sécurité…) ne posent plus de problèmes, grâce aux machines désormais proposées par les constructeurs.

Ceci dit, les opérateurs suédois ne sont pas les seuls en Europe à vivre le retour en grâce du train de nuit. Serco, avec son Caledonian Sleeper entre Londres et l’Écosse, ou l’opérateur autrichien ÖBB avec son Nightjet sillonnant l’Europe centrale, pourraient également se mettre sur les rangs pour reconnecter la Suède au continent européen par le train !



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